Colossiens est une lettre de Paul (l’un des dirigeants du mouvement chrétien primitif, emprisonné à Rome lors de la rédaction de la lettre) aux chrétiens de Colosses (une petite ville du sud-ouest de la Turquie actuelle).
Dans Colossiens 1.24 à 2.1, Paul explique son appel au minist`ere et les souffrances qu’il y éprouve. Certains aspects du ministère de Paul lui sont uniques (par exemple, en tant que missionnaire interculturel auprès des païens méditerranéens du 1er siècle). Mais un autre aspect, comme nous le verrons, n’est pas du tout unique. Cet aspect est décrit en Col. 1.28,29. Examinons de très près ces deux versets, en posant trois questions : Qu'est-ce que ce ministère ? Qui doit le faire ? Comment le faire ?
Certains gens appellent ce ministère « mentorat ». D’autres l’appellent « se développer ». Pour des raisons de commodité je l’appellerai « faire des disciples » puisque c’est ainsi que Jésus l’a appelé (Matthieu 28.19). L’essentiel est d’aider chaque chrétien à atteindre la maturité spirituelle.
« Complet » (le mot grec teleios) ne connote pas la perfection morale ! Il signifie atteindre le but visé, développer son potentiel, accomplir l’objectif que l’on s’est fixé. Lorsque Paul utilise ce terme en référence aux chrétiens, il signifie devenir spirituellement matures (Éphésiens 4.13) – capable de considérer tous les principaux domaines de la vie du point de vue de Dieu (Hébreux 5.13,14), et capable de prospérer en recevant l’amour de Dieu et en donnant l’amour de Dieu aux autres (voir 1 Jean 4.11,16).
Remarquez que Paul répète l’expression « tout » – tout être humain, tout homme – dans Col. 1.28. Dieu veut que chacun de ses enfants atteigne la maturité spirituelle ! Bien sûr, vous ne pouvez pas atteindre la maturité en tant qu’enfant de Dieu si vous ne devenez pas d’abord l’enfant de Dieu – et vous devenez enfant de Dieu en recevant personnellement le Christ (voir Jean 1.12). Mais une fois que vous êtes devenu l’enfant de Dieu, c’est sa volonté que vous deveniez un adulte spirituel. Lorsque les gens restent immatures dans leur développement humain de base, nous reconnaissons tous cela comme une tragédie. C’est également une tragédie lorsque les chrétiens restent spirituellement immatures toute leur vie.
Que faut-il pour devenir spirituellement mature en tant que chrétien ? Selon Paul, il faut l’aide intentionnelle d’autres chrétiens. C’est pourquoi il parle de « présenter toute personne complet (adulte) en Christ ». L’idée ici est que lorsque le Christ reviendra, nous devrons lui présenter les autres chrétiens que nous avons aidés à progresser – non pas pour nous vanter, mais comme un élément crucial de notre service pour lui. Cela implique une réponse à la deuxième question …
Paul indique qu’aider chaque chrétien à atteindre la maturité spirituelle est le privilège et la responsabilité de chaque chrétien.
Dans Col. 1.25-27, Paul utilise le pronom « je » pour décrire son ministère personnel unique. Puis en 1.28, il passe à « nous » lorsqu'il décrit ce ministère, disant en 1.29, « A cet effet, je travaille et lutte. » Pourquoi passe-t-il à « nous » ? Parce que Paul veut souligner qu’il est l’une des nombreuses personnes (« nous ») qui accomplissent ce ministère. Le « nous » peut se référer au groupe apostolique de Paul, mais il est plus probable qu’il se réfère à tous les chrétiens.
Ceci est confirmé en Col. 3.16. Remarquez la similitude entre Col. 1.28 et Col. 3.16. Le contenu est le même (« Christ » ; « la parole de Christ »). Les moyens de communication sont les mêmes (« instruite et avertir en tout sagesse »). Vraisemblablement, l objectif (maturité) est le même. Mais remarquez que Col. 3.16 appelle tous les chrétiens de Colosses à s’entraider « les uns les autres » vers cet objectif. Faire des disciples est pour tous les chrétiens !
Nous voyons ici ce qui pourrait être l’échec le plus grave de la plupart des églises occidentales – leur incapacité à persuader leurs membres que chacun d’entre eux devrait aider les autres membres à atteindre la maturité spirituelle. Dans ses études sur les églises évangéliques américaines, par exemple, le chercheur George Barna a montré que, bien que beaucoup/la plupart des évangéliques américains ne s’intéressent à ce ministère qu’avec des belles paroles, pratiquement aucun (y compris les pasteurs) ne le pratique réellement. Cette omission a entraîné une profonde défiguration de la plupart des églises occidentales.
Au lieu que les églises ressemblent à des familles saines, dans lesquelles tous les membres prennent la responsabilité d’aider les autres membres à se développer, elles ressemblent davantage à des garderies perpétuelles, dans lesquelles quelques professionnels épuisés gardent en masse des personnes qui restent dans l’enfance spirituelle.
Lorsque les églises établissent un réseau de ces relations au sein de petits groupes ou des églises de maison, le résultat est une communauté réelle et aimante qui attire les personnes perdues vers Jésus (voir Jean 13.34,35 – Jésus a aimé ses disciples de la manière décrite ci-dessus). Sans ces relations de discipulat, la plupart des membres restent isolés, solitaires, beaucoup plus vulnérables à la tentation et beaucoup moins susceptibles d’attirer des personnes perdues vers le Christ.
En revanche, les églises chrétiennes dans le monde en développement (dont des milliers sont explosent quantitativement) considèrent le ministère de faire des disciples comme biblique et normal – et se demandent pourquoi les chrétiens occidentaux ne le font pas.
QUALIFICATION : Le fait que tous les chrétiens doivent pratiquer ce ministère ne signifie pas que tous les chrétiens doivent le pratiquer exactement de la même manière. Dans cet appel uniforme, il y a beaucoup de place pour la diversité personnelle :
Certains d’entre nous peuvent aider principalement des chrétiens beaucoup plus jeunes, tandis que d’autres peuvent aider principalement leurs pairs spirituels. Et les jeunes chrétiens peuvent aider les chrétiens plus âgés vers la maturité.
Certains d’entre nous aideront exclusivement les personnes de leur propre église de maison, tandis que d’autres aideront également d’autres personnes en dehors de leur église de maison.
Certains d’entre nous peuvent en faire leur ministère principal, tandis que beaucoup d’entre nous (comme moi) le feront en même temps que beaucoup d’autres ministères.
Certains d’entre nous (en raison de l’opportunité, de la maturité spirituelle et/ou du stade de vie) auront la capacité de le faire avec de nombreuses personnes, tandis que certains d’entre nous auront la capacité de le faire avec une seule personne.
Ce qui est vital, c’est que (comme pour l’évangélisation) chacun d’entre nous embrasse cet appel de Dieu, que nous lui demandions de nous montrer qui aider – et que nous prenions ensuite l’initiative de le faire. Cela nous amène à la troisième question …
La plupart du contenu de ces deux versets aborde cette question. En fait, Paul donne nous les trois réponses les plus importantes ici-même.
La première réponse de Paul à cette question est que pour faire des disciples, il faut se concentrer ensemble sur la parole de Dieu – la Bible. « Nous annonçons le Christ » signifie ici : « Nous nous communiquons les uns aux autres le message concernant Jésus. » Vous pouvez voir ce même accent dans Col. 3.16 : « Que la parole du Christ, avec toute sa richesse, habite en vous […] » souligne que ces relations doivent être saturées de vérité biblique. Cela ne devrait pas nous surprendre, puisque 1 Pierre 2.2 dit que la consommation régulière de la parole de Dieu est ce qui nous permet de croître spirituellement.
Comment communiquons-nous la parole de Dieu les uns aux autres ? Nous « avertissons et instruisons » les uns les autres. « Instruire » c’est le mot didasko en grec, c’est-à-dire que nous nous aidons mutuellement à se familiariser avec la Bible et à comprendre les principales doctrines. « Avertir » est le mot grec neutheteo, ce qui signifie appliquer personnellement la parole de Dieu aux situations de vie des uns et des autres par le biais de conseils, d’avertissements, de corrections ou d’exhortations.
« Avec toute la sagesse » ne signifie pas « avec toute la sagesse de l’univers » ; cela signifie « avec toute la sagesse que nous avons. » Dans la Bible, la sagesse n’est pas une connaissance biblique abstraite ou théorique, mais de savoir comment appliquer la parole de Dieu au quotidien.
Ceci (ainsi que le point suivant) implique de se rencontrer régulièrement les uns avec les autres pour lire et discuter de la vérité biblique à cette fin. Vous n’avez pas besoin d’être un expert biblique pour faire cela ! Vous pouvez simplement lire à haute voix un livre biblique, une petite section à la fois, et en discuter de cette manière. Ou vous pouvez lire à haute vois un livre chrétien de qualité, une petite section à la fois, et en discuter de cette manière. Cela nous amène naturellement à discuter de l’application pratique de la parole de Dieu, ce qui nous permet de croître.
La deuxième réponse de Paul à cette question est que la formation de disciples nécessite un effort à long terme : « À cet effet, je travaille et lutte avec la force […] ». « Travailler » est le mot grec kopaio, qui était utilisé pour décrire le travail quotidien, toute la journée, que les agriculteurs accomplissaient. Le verbe « lutter » est le mot grec agonizomai (d’où vient le verbe « agoniser »), qui était utilisé pour décrire les coureurs de marathon. Ces deux verbes évoquent donc un effort constant sur une longue période de temps. Parce que la maturité spirituelle prend beaucoup de temps, nous nous engageons à rester les uns avec les autres sur le long terme – généralement pendant des années, pas seulement pendant des semaines ou des mois.
Un élément clé de cet effort à long terme est de prier les uns pour les autres. Paul souligne ce point plus loin, en Col. 4.12. Épaphras aide les chrétiens colossiens à croître en « combattant sans cesse » (agonizomai) dans ses prières pour eux. Prier les uns pour les autres, ce qui inclut prier les uns avec les autres, est un élément clé pour s'entraider vers la maturité – prier pour l'encouragement mutuel dans l’adversité, pour la motivation à aimer les gens dans nos vies, pour avoir un aperçu de la parole de Dieu, pour exposer les mensonges sataniques, etc.
Beaucoup de gens sont impatients et veulent des solutions rapides. Mais la véritable maturité spirituelle ne sera jamais une solution miracle. C’est dans des relations engagées, construites autour de la parole de Dieu et de la prière, que Dieu nous transforme progressivement pour que nous ressemblions davantage à Christ. Ce n'est pas fantaisiste, ce n'est pas dramatique, et ce n’est certainement pas rapide, mais c’est efficace comme rien d’autre !
Vous vous dites peut-être : « Où vais-je trouver l’énergie et l’endurance pour faire cela ? » C’est précisément pourquoi Paul termine Col. 1.29 de cette façon : « […] avec la force qui vient du Christ et qui agit en moi avec puissance. » « Puissance » et « agir » viennent du mot grec energeia, d’où viennent nos mots « énergie » et « énergiser ». « Avec puissance » est dunamis, d’où nous tirons nos mots « dynamique » et « dynamisme ». Le Saint-Esprit de Dieu, qui habite en chacun des enfants de Dieu, vous donnera la force de vous entraider fermement et patiemment (Col. 1.11) les uns les autres sur le long chemin de la maturité spirituelle.
La question est la suivante : Demandez-vous régulièrement au Saint-Esprit de vous donner les moyens d’atteindre cet objectif (Luc 11.9,13) ? Pourquoi certains chrétiens s’épuisent-ils dans ce ministère de faire des disciples, alors que d’autres y prospèrent année après année ? L’une des raisons principales est que ces derniers ont appris à demander régulièrement au Saint-Esprit de leur donner la force de le faire, reçoivent l’énergie divine pour leur travail et vivent une vie pleine d’énergie même en vieillissant !
DISCUSSION : Veuillez partager votre expérience en répondant à ces questions :
En quoi l’étude de la parole de Dieu dans ce contexte est-elle différente de l’étude privée de la Bible ou des enseignements bibliques ?
Quels bénéfices avez-vous tiré de votre engagement à faire cela avec une autre personne sur une longue période ?
Comment avez-vous fait l’expérience du pouvoir de Dieu en faisant cela ?
Qu’est-ce qui vous dissuade de le faire ?
« Des rendez-vous personnels réguliers nous aideront à répondre à nos besoins personnels et à indiquer des moyens de résoudre les problèmes auxquels (nous) sommes confrontés dans la vie […] (et) ils s'assurent que nous apprenons les bases du christianisme et que nous commençons à nous sentir chez nous avec la Bible. » Ajith Fernando, The Call to Joy and Pain (L’appel à la joie et à la douleur) (Crossway, 2007), p. 163.